Bonjour à toutes et tous,
Un début d’année chargé et deux mois sans article ! Quelques publications à découvrir, tout d’abord dans le 179e de la revue Verso (décembre 2019).
C’est toujours un plaisir de figurer dans les pages de cette belle revue, référence dans la poésie depuis plus de quarante ans. Je vous reproduis ici les trois textes qui font partie d’un ensemble que j’ai nommé Cicatrices :
Cicatrices
1- Alep
alors le vacarme se tait
l’aube
déchire les ténèbres
sans autre horizon possible que ce voile noir
après une nuit de bombardements
on dirait de la neige
et pourtant non
c’est encore plus froid
plus silencieux
paralysant
personne ne joue avec
et surtout pas les enfants
calfeutrés
ensevelis
sans vie
il a plu à chaque heure
à chaque minute
à chaque seconde
toutes ces histoires, les siècles
effacés en un instant
sous le regard indifférent du monde
cicatrice
à jamais béante dans l’étouffant ciel rouge
de l’humanité
2- Sur la route
sur la route
criblée d’impacts de balles
une voiture calcinée
encore fumante
dans laquelle jouent
quatre enfants
depuis la crête en face
on les dirait armés jusqu’aux dents
les branches mortes qu’ils prennent pour fusils
semblent plus vraies que nature
la sentinelle se tend
porte la main à son talkie-walkie
sur la route de Tel-Aviv
l’un d’eux
voudrait venger son père assassiné lors d’un
check-point
le second voudrait laver les humiliations quotidiennes
de son peuple
les deux derniers sont plus petits
mais le mépris
ils le connaissent déjà
ils s’imaginent en libérateur
mettant terme à un conflit sans fin
un crépitement dans le haut-parleur
l’ordre est formel
ne pas prendre de risque
inutile de laisser mûrir
les bourgeons de la révolte
écran noir
total
une fraction de seconde après la déflagration
sans même un cri
partis pour toujours
3- Palestine
c’est toujours l’été ici
sur le flanc des collines rocailleuses
du sommet on voit la mer
et les vergers qui s’accrochent
malgré la chaleur
les racines profondément ancrées dans le sol
une délicate odeur d’orangers
envahit les narines
le reflet argenté des oliviers
enchante le regard
le bruissement
de la caresse du vent dans les feuilles
apaise l’esprit
si tout pouvait être simple comme
cet après-midi
si l’écho du monde
se perdait dans le lointain moutonnement des vagues
si la présence de ton corps chaud nacré de soleil
n’était pas qu’une parenthèse
si ta respiration et la courbe délicate de tes seins
étaient autre chose que la fin de ce rêve
si ce n’était pas la guerre
©Clément Bollenot, décembre 2017
Egalement deux textes publiés dans le 45e numéro de Lichen (février 2020) :
Très beaux poèmes Clément qui me touchent tu sais pourquoI
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Merci… Effectivement, je vois très bien pourquoi…
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